mercredi 19 novembre 2014

Journal d'un Français prisonnier en Allemagne


   Mon grand-père, Alphonse FRYSOU, né à Croix près de Roubaix, en 1896, avec son père Lucien FRYSOU (né à Schaerbeek, près de Bruxelles en 1874) fit partie des nombreux civils du Nord de la France qui furent emmenés prisonniers en Allemagne en octobre 1914. Nous lui demanderons bientôt les circonstances de son arrestation, qu’il a consignées dans son journal de captivité tenu rigoureusement de 1914 à 1916.


 Alphonse Frysou en 1912. Il a seize ans. 
Sa bicyclette Salvador a des pneus Dynck Aigle Hutchinson et a coûté 150 F.
             


           En novembre 1914, il traîne son existence au fameux camp de Merseburg près de Leipzig.
  
Voici présentés, cent ans après, quatre jours de sa vie de prisonnier notée dans son journal, qui donnent l’ambiance de la vie du camp, et les nouvelles de la guerre qui y parvenaient. Le conflit est vraiment perçu comme mondial dès cette époque.

NB « tuyaux » veut dire : informations qui circulent. Nous conservons les mentions peu claires.


Samedi 14 novembre    37/36/28     Verglas, soleil, averses
Matin 7 1/2  Jus – tartines confiture framboise, K
Midi   macaroni au lard TB
Soir 4 ½   soupe de pain moisi (refusé hier  par notre capitaine) père sale, moi sucre.

Revue de 9 à 10  - Reprisage – Rassemblement à 3h : on cherche les Zouaves et les Turcos. Abel achète un harmonica. Tuyaux : Russes ont fait 15 000 prisonniers civils – ils sont en Sibérie et très mal logés. On s’occupe de nous à Berne. On va mettre les civils et les soldats ensemble et par nationalités. L’Allemagne réclame indemnités pour tous les prisonniers civils sans échange, mais rapatriement. La France ne veut payer que pour ceux de 18 à 48 ans, les jeunes, vieux et étrangers n’auraient pas dû être pris. Elaboration du programme pour la fête de demain.


Dimanche 15 novembre 14  38/37/29   Passable

Matin 7    jus – rabiot – confiture framboise - K
Midi 11   Julienne- rabiot- confiture k
Soir 3 ½    jus – saucisson blanc 1/10 de pain

Revue de 9 à 9 ½ avec couverture, gamelle, cuiller, essuie. Comme Gueule d’Acier n’est pas là, ça va vite. Je reporte tinette au jus pour me faufiler à la cantine avec Adrien. Grand lavage. La 12° est de corvée et la 13-1ère aux tinettes. – Lessive de chaussettes . Je vais au concert : flûtiste émérite, joue avec son nez en mangeant et en fumant – Catteau et Ladsous avec leurs chansons de circonstances. Pendant ce temps Père fait son barème et met des « daches ? » à ses galoches et reçoit de Gunther l’ordre de faire dormir tête à tête. La quête du concert au profit des nécessiteux a produit 32 marks. Tuyaux : Kronprinz est mort de ses blessures. Victoire française à Nieuport – Les prisonniers faits à Douai 15 jours avant nous seraient libérés. Les Russes quittent notre …


Lundi 16 novembre 14   39/38/30     Pluie

Matin 7    jus – tartines, saucisson blanc fumé K
Midi 11   - riz au lard 
Soir 5   - gruau d’avoine - « tart » chocolat

9 ¼ 9 ½ on nous défend de nous raser – A 3 h alerte avec tout notre bazar sauf les paillasses – à 4 – pour faire place aux 35 000 Russes qui viennent d’être faits prisonniers -  On nous met à 7 sections par chambre soit 140 hommes au lieu de 100. Il y aura donc une chambre de vide par groupe, 3 par compagnie, 24 pour le camp. Nous échouons donc à la chambre 25b. 7 pour 5 paillasses. Il ne fait presque pas clair. On dort comme on peut avec Père. On a une paillasse comme oreiller. Nous mettons les couvertures en draps. Inauguration de la chambre dans l’obscurité par chants divers. La 13° est de corvée – J’écris à Mère. Tuyaux : Départ des civils : 1er décembre. Mort du Kronprinz confirmée par une sentinelle alsacienne. Les Russes sont à 35 km de Berlin. Guillaume II demande un armistice. Nous touchons des nouvelles louches.

Mardi 17 novembre 14    40/39/31   froid excessif, boue

Matin 7 h    jus tart. chocolat
Midi 11     julienne – Saucisson fumé – K
Soir 4 ¼     jus, saucisson blanc, 1/10 de pain – saucisson fumé K

Avons passé une mauvaise nuit, sommes désorganisés pour les tinettes et devons sortir. On sert les groupes entiers dehors et devant les baraques du groupe. A 9 h revue avec torchon. – à 9 ½ appel avec tous les brocs, seaux, bassins, voire gamelles et caisses à rollmops ! (Carré pousse la charge jusqu’à une boîte de sardines). Gueule d’acier nous fait porter du sable jusqu’à 11 h ( fais environ 10 tours). De 1 à 3 même corvée. On fait un enclos pour le chef de chambre. On chipe une paillasse pour nos pieds. Telliez a été volé pendant la nuit. Visite du consul américain aux Anglais. Nous voyons pour la 1ère fois notre situation sur la carte de Corselle.  Tuyaux : carte 69 du 7 ct- Ils y sont encore !! Des Russes disent que leurs patrouilles ont été jusqu’à 18 km de Berlin ! Les Allemands annoncent 40 000 prisonniers russes. – On me dit que j’ai la paillasse d’un mineur pouilleux !

mercredi 12 novembre 2014

Rénovation du monument aux Morts


Notre monument a été érigé en 1924. Il a donc 90 ans. 
Notons l'inscription originale portée sur le drapé : A nos soldats de la Grande Guerre ne rend pas hommage qu'aux morts...
En février 1924, le Conseil Municipal de Clermont approuve la construction du monument aux Morts là où il se trouve actuellement. En mars, le Maire de Clermont, Edmond Faure  passe  sa commande à l’entreprise Rombaux de Jeumont dans le Nord. Il s’ agit  d’un monument de granit belge “France au drapeau”. La ville de Jeumont se trouve sur la frontière et M. Rombaux possède des carrières en Wallonie. Les 30 noms seront gravés et dorés, de même que les prénoms. Le prix, fourniture, transport, pose et main d’oeuvre compris, est de 10 500 F. Une souscription organisée dans la commune, le 10 avril 1924, permet de recueillir la somme de 2135,50 F. Cent sept habitants ont donné.
L’entrepreneur précise sur le bon de commande, peut-être à la demande du conseil municipal, que  ni la matière première ni la main d’oeuvre ne seront d’origine allemande. 

La gravure d'origine s'est doucement effacée au fil des années... Repeindre les lettres aurait été relativement coûteux et peu durable.
Le conseil municipal a donc choisi de faire poser une plaque de marbre portant les 30 noms " à l'identique" : mêmes caractères, même ordre, même disposition.
Le devoir de Mémoire est accompli. Pour eux, merci.



dimanche 9 novembre 2014

Antoine Petit


Antoine Petit était le fils de Jean Petit et de Marie Daniel, notés dans nos registres comme cultivateurs à la Valade, en fait à l'endroit appelé aujourd'hui le Tuquet. Il avait épousé MarieVillot le 22 décembre 1911. 
Il avait au moins un frère Julien, qui sera tué en février 1916 en Alsace et une soeur prénommée Marie comme leur mère. 
Antoine et Julien sont les grands-oncles de Daniel Paillet et de sa soeur Roselyne.



Antoine Petit repose à la nécropole nationale de Chauny. 
De violents combats ont eu lieu dans cette ville de l'Aisne, prise par les Allemands dès le 1er septembre 1914. Après la bataille de la Marne, les Français n'arrivent pas à la reprendre et elle restera occupée jusqu'en 1917. Elle sera bombardée par l'aviation alliée et détruite en partie. 


Ceci est une carte postale sans doute éditée en 1914, vu l'uniforme du soldat et le costume alsacien de la jeune femme mais envoyée en 1916 par Georges Conangle, de la Valade à Marie Petit. La carte a été postée à Casteljaloux.